Quand Alpha Condé dit qu’il est africaniste, certains ouvrent largement les yeux, pendant que d’autres tournent carrément le dos à une telle déclaration. Faut-il donc en rire ou en pleurer ? En pleurer est beaucoup plus politiquement correct. Cette sortie du président guinéen en dit long sur la mauvaise posture dans laquelle il est cloîtré, ce depuis qu’il est au pouvoir. En réalité, c’est son histoire de diviser pour régner qui se cristallise tous les jours qui le soûle.
Aujourd’hui, c’est plus corsé avec le tribalisme instauré dans l’administration publique. Tout à l’allure d’appartenance ethnique et régionale. Mais Alpha Condé cherche désespérément à gommer cette estampille, mais, le mal étant fait, il est bien difficile de s’en débarrasser. A ce jour, il fait une autre révélation comme pour se laver de tous soupçons. Une confidence donnée au cours de sa dernière sortie avec la presse nationale. Oubliant qu’il avait déclaré que la Guinée n’est composée que de trois régions, Alpha bat en retraite : « Je me suis marié à Dakar avec une femme Peuhle qui s’appelle Mama Kany Diallo qui est de Kankalabé (Dalaba) dont le père était chef de canton à Kébaly. Vos conneries de savoir qui est malinké, qui est peulh ou qui est Soussou, c’est votre affaire, moi ce n’est pas mon affaire. Je suis panafricaniste. »
Pourtant, en accordant une interview à Sud FM et de l’Enquête, des médias sénégalais, Alpha Condé avait dit : « Vous avez trois régions en Guinée : la Haute Guinée, la Forêt et la Basse-Guinée. (…) moi, je ne suis pas venu pour faire l’équilibre ethnique.» Plus tard, Condé s’est rectifié pour dire que la Guinée c’est une voiture qui a quatre roues. Des mois après, au cours d’une de ses rares visites à Labé avait déclaré : « On dit que je ne suis pas venu au Foutah. Pourtant, c’est la première fois que j’arrive à Kankan. Depuis mon élection, je n’avais jamais été à Kankan. Je sais que le Foutah n’est pas contre moi, je ne suis pas contre le Foutah. La Forêt n’est pas contre moi, je ne suis pas contre la forêt. La Haute Guinée n’est pas contre moi, je ne suis pas contre la Haute Guinée. La Basse Guinée n’est pas contre moi, je ne suis pas contre la Basse Guinée. »
Cette nouvelle donne fait-elle de Condé un panafricaniste ? Absolument pas. Il constitue un chantre du clivage ethnique. Et Jean-Marie Doré en sait quelque chose : « Le Foutah et le mandé sont de très anciens groupements musulmans. Il est dommage que ces deux groupes ne se comprennent pas. » Et d’ajouter : « Les résultats des élections législatives, Alpha a pris le maximum en haute Guinée. » Et bonjour les décomptes : « Il y a plus de 140 chefs de quartiers à Conakry, les Malinkés occupent 39 postes, les Peulhs ont presque la majorité et les Soussou ont le reste. Il n’y a que deux postes qu’occupent les forestiers. Or, à Conakry le groupe allogène le plus important ce sont les peuhls, ensuite les forestiers et les Malinkés viennent en 3ème position. Mais les malinkés ont plus d’influence à Conakry que les forestiers qui sont majoritaires. Parce que les forestiers sont profondément individualisés. Aujourd’hui, il faut aller au de-là des ces clivages inutiles pour nous mettre ensemble, être plus forts pour écraser nos difficultés. Dispersés comme vous êtes on ne vous respecte pas, vos intérêts ne comptent pas. C’est pourquoi l’exigence de l’unité est sacrée comme la forêt sacrée. »
Alpha Condé est vraiment un panafricaniste ! Drôle de panafricaniste.
Jeanne FOFANA, Kabanews
