L’amélioration du quotidien des Guinéens a été tout simplement omise, occultée dans le discours d’Alpha Condé, consacré au nouvel an. Et pourtant, il s’est bel et bien félicité de ses performances en dépit du virus Ebola « où le pays a rétabli ses grands équilibres macro-économiques. »
Une réelle dérobade en somme qui intervient au moment même où des syndicats, longtemps priés de serrer la ceinture demande une amélioration des conditions de vie et de travail, donc du respect du code du travail, des accords signés entre gouvernement, patronat et syndicats. Mais Alpha Condé n’en a cure. En lieu et place des préoccupations syndicales, le président guinéen se taille des perles, comme pour narguer : « En seulement 4 ans, la dette de la Guinée a baissé de 66%, et la dette en proportion des exportations a été ramenée de 186% à environ 45%. Et l’inflation qui était de 23% il y a quatre années est aujourd’hui au dessous de 10%. Mais ces efforts devraient se traduire en amélioration de la vie quotidienne des citoyens, par l’augmentation de leur pouvoir d’achat. Pour la première fois depuis des décennies, nous avons enregistré au départ en 2011 un taux de croissance économique en hausse constante. »
Comme tel est le cas, pourquoi se dérober ? Pourquoi ne pas penser à ces nombreux Guinéens usés et abusés par des promesses depuis le fameux point d’achèvement des PPTE ? C’est Alpha Condé lui-même qui dépeint la santé solide de l’économie nationale. Ce n’est donc pas une invention d’une tierce. Seulement voilà ! De l’avis du porte-parole du gouvernement, l’un des acteurs de la négociation avec les syndicats, lesquels menacent d’aller en grève dès lundi, tranche aux micros de nos confrères de Guineenews.
Selon Damantang Camara, « Le point qui suscite le plus de divergences concerne la grille salariale. Les syndicalistes souhaitent une actualisation de l’actuelle grille en même temps qu’une revalorisation du point d’indice qui correspondrait à une augmentation de salaire de 300% ! (…) une telle augmentation comporterait des conséquences graves pour nos équilibres macroéconomiques, surtout au moment ou l’épidémie Ebola met à terre notre économie. Ceux-là mêmes qu’ils nous ont aidé à rétablir et maintenir depuis maintenant quatre ans. Lors de notre dernière séance de discussion nous leur avons donc exposé l’impact économique qui résulterait de la satisfaction de leurs exigences salariales. »
D’un côté donc, Alpha Condé se félicite de ses performances, exige l’accroissement de son budget en adoptant pas la même rigueur ou la même hargne pour les autres secteurs prioritaires. De l’autre, on se dérobe de la façon la plus malhabile en évoquant Ebola. Toujours Ebola. Du n’importe quoi en somme ! Ce qui fait dire à certains, que le pouvoir est de mauvaise foi. Accusation fortuite ou pas, il y a lieu de convenir qu’il y a de l’eau dans le gaz. Ce début d’année-là risque d’être âcre. Seuls les discours ne sauraient arrondir les frictions. Pourvu que, par l’entêtement d’Alpha Condé, les mouvements de janvier et de février 2007 ne soient pas réédités.
Jeanne Fofana, www.kababachir.com
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