L’une mourait il y a deux ans sept mois, l’autre il y a tout juste quatre mois. Leur point commun : être tombés sous les balles des bandits, dans des circonstances très obscures. Leur destin continue d’émouvoir des centaines de milliers voire des millions de Guinéens.
Considérés comme victimes de leur bonne foi, Madame Aissatou Boiro, ancienne directrice du Trésor public de la Guinée, assassinée en novembre 2012, et Monsieur Thierno Aliou Diaouné, ex-ministre de la Jeunesse sous la transition tué en janvier 2015, sont adulés par tous ceux qui veulent le changement de mentalités en Guinée.
Beaucoup de temps est passé depuis que nous les avons perdus sans qu’on ne sache pourquoi, comment et par qui ces braves citoyens ont été ciblés. Officiellement, des suspects sont sous les verrous. D’autres sont recherchés par les services de sécurité guinéens. Selon la version officielle, ils se sont retrouvés au mauvais endroit au mauvais moment. Mme Boiro s’est retrouvée à un endroit où les bandits s’en sont pris à des personnes, et M. Diaouné est victime d’une tentative de vol de sa Toyota Land Cruiser qui a mal tourné.
‘Qu’il s’agisse du cas de madame Boiro, ou du ministre Diaouné, malheureusement, ces deux hautes personnalités se sont trouvés au mauvais endroit au mauvais moment. Madame Boiro, était sur la circulation comme toute autre personne, lorsque plus loin devant elle, des bandits se sont pris à des personnes, pris de panique son chauffeur au lieu de rebrousser chemin, a foncé devant, et les assaillants ont pensé que c’est une intervention des services de sécurité, et ils ont mitraillé son véhicule; ça c’est la loi du hasard, j’appelle ça de la malchance‘, a dit Dr Mahmoud Cissé le ministre de la Sécurité et de la protection civile.
Mais cette thèse est d’autant plus difficile à avaler que ces assassinats étaient intervenus à des moments où leurs victimes se sentaient menacées. Madame Boiro, par exemple, avait joué un rôle décisif dans le démantèlement d’un réseau qui avait tenté de détourner 13 milliards de francs guinéens quelques mois plutôt. Se sentant menacée par des ‘bandits en col blanc’ pour avoir refusé, comme l’avait déclaré le ministre Kerfalla Yansané, ‘tout compromis entre l’intérêt public et les intérêts sordides des groupes mafieux‘, avait dit être inquiète pour sa vie. Mais malheureusement, elle n’avait bénéficié d’aucune protection.
Monsieur Diaouné aussi s’était confié à plusieurs personnes pour dire qu’il craignait pour sa vie. Mais, comme la dame de fer, ses alertes n’ont servi à rien.
Si, malgré ces indices troublants qui renforcent la thèse de meurtres avec préméditation, orchestrés par des personnes bien placées dans l’administration publique, le ministre Cissé soutient que ces bons Guinéens sont morts par malchance, c’est tout simplement un scandale, car lui seul peut croire à cette thèse. Bien que cela ne doit pas surprendre, surtout quand ça vient du premier responsable du département, qui s’est assigné pour seule mission la répression des manifestations publiques.
Thierno Diallo, www.kababachir.com