Mariam Sagno, journaliste stagiaire à la radio rurale de N’Zérékoré, est l’une des rescapés à la tragédie de Womey, une sous-préfecture située à 50 km du Chef lieu de la préfecture. Ce jour-là (mardi 16 septembre 2014), elle faisait parti de la délégation de sensibilisation contre Ebola, qui s’était rendue à womey. Pris en otages par des jeunes hostiles à la campagne de sensibilisation contre Ebola, six membres de la délégation, le sous-préfet de la localité et deux autres personnes ont été exécutés et jetés dans une fosse commune.
Joint au téléphone par notre confrère de la radio Espace Fm, dans l’émission ‘’les Grandes Guelles’’, Mariam Sagno, explique sa mésaventure. Témoignage…
« Je faisais parti de la délégation au compte de la presse. Nous on a quitté ici mardi dans la bande de 9 heures pour se rendre à womey, on est rentré dans le village presqu’à 12 heures. On est rentré chez le sous-préfet, paix à son âme, qui nous a offert du jus. C’est moi-même qui avais partagé le jus avec une copine qui s’appelle Aminata Kourouma. Après avoir pris le jus, on s’est rendu à la place publique du village, on est resté là bas. Vers 12 heures 05 mn, les sages sont venus présentés les colas à l’autorité, comme cela est de coutume. Après ça, le doyen du village a pris la parole pour expliquer le motif de la présence de cette délégation dans le village. Après ça, le gouverneur a pris la parole pour remercier le village, parce quand on est arrivé, on s’est lavé les mains avec du chlore, on a trouvé que c’était installé dans divers endroits du village. Le gouverneur lui-même a dit, on est vraiment convaincu que womey est sur le chemin de combattre le virus Ebola. Après l’intervention du gouverneur, il y a un autre citoyen qui travaille à la presse qui a pris la parole pour expliquer comment on attrape Ebola et si on a Ebola,comment on la soigne. Il a expliqué toutes ces choses là en langue nationale Kpélé. Il n’a même pas fini d’expliquer, on a vu des jeunes se regrouper venir. Pour nous c’est autre chose, ils sont venus ils nous disaient seulement allez-y, allez-y ! Celui qui parlait leur a dit d’accord, on va s’en aller, mais laissez-nous tout simplement, on va s’en aller. C’est ainsi qu’on a vu des caillots venir de part et d’autre vers nous, tout le monde à cherché à se sauver. Nous on n’a pas pu rejoindre les voitures sur lesquelles on était venu. Ils ont cassé les para brises des voitures, il n’ya aucune voiture qui est revenu en bon état àN’Zérékoré. Ils ont saccagé les voitures et certains se sont précipités pour rejoindre leurs voitures. Nous qui n’avons pas pu rejoindre les voitures, nous, on est resté là- bas. Ils ont commencé à nous frapper, moi il y a un jeune qui disait laisser-là, c’est une fille, elle est trop petite d’abord ne la frapper pas. Laissez-là, partir. Le jeune là m’a pris, il m’a envoyé dans sa chambre je suis resté là bas jusqu’à 20 heures. Mais il n’y avait pas de réseau, je me disais comment rejoindre mon service et mes parents. Mais j’ai dit, je vais prendre Dieu, je vais suivre le chemin je vais partir. Quand j’ai passé la nuit dans un buisson, assise sous la pluie, je suis restée là bas jusqu’au lendemain. Il a fallu que je change de stratégie, parce qu’il avait des initiés là bas, je les ai menti, je n’ai pas dit que je suis venue dans la délégation de sensibilisation. Je les ai dit que je suis venue assister à l’initiation d’une collègue dans ce village. Donc je suis venue pour ça. Je dis aux gens que je ne connais pas le village, ceux m’ont pris maintenant, ils m’ont accompagné, on a contourné le village, on a marché à pied jusqu’à ce qu’on est arrivé dans un autre village voisin. C’est de là bas que j’ai pris un taxi pour rejoindre N’Zérékoré ville.»
A la question de savoir de quoi ces jeunes reprochent-ils à la délégation et qu’est ce qui les a motivés de se livrer à des tels actes ?
Mariam Sagno répond : « Pour eux, Ebola n’existe pas, c’est nous qui son venus les contaminer, parce que nous, on est venu avec Ebola ». Et la rescapée d’ajouter : « la délégation était avec des militaires, il y avaient six éléments, mais il n’ya pas eu des coups de feu », autrement dit, ils n’avaient pas répliqué.
Selon cette rescapée, les otages ont été exécutées le même jour et de préciser : « les jeunes étaient armés de lance pierre, des bâtons, des gourdins,… » Et d’ajouter : « les jeunes n’ont pas écouté les sages. On était tous avec les sages ».
S’agissant de son état de santé actuel, Mariama Sagno précise qu’elle suit un traitement à la suite des blessures légères qu’elle a eues au cours des altercations: « Mon papa m’assiste pour mon traitement avec les coups de bâtons que j’ai eus au niveau des reins ».
Pour l’instant, les autorités n’ont rien fait pour assister cette rescapée, sauf que des promesses non encore réalisées.
Décrypté et transcrit par Abdoul Wahab Barry, Kabanews