Institutions judiciaires : et si le Garde des Sceaux se retenait ?

« Votre qualité de Ministre de la Justice devrait vous astreindre à critiquer les propos de quelqu’un qui est revêtu des suffrages du peuple de Guinée. Entre vous et moi, je suis celui qui est habilité à parler au nom du peuple. Nos concitoyens sont toujours préoccupés par le manque de détermination de la justice à enquêter sur les crimes et les délits commis sur eux et à poursuivre leurs auteurs présumés. »

Ce long extrait date d’environ un an, au moment même où Lascaris, le diplomate militant distillait son militantisme à Conakry, en faveur d’Alpha Condé, alors en pleine nasse politique. Un an juste, le même ministre, reconduit dans le gouvernement Youla, cherche l tête du même député. Plus remuant que jamais. « Je sais que vous n’en êtes à votre premier dérapage me concernant, car je vous vois mal critiquer une déclaration du président de la république qui jouit du même mandat et de la même légitimité. Je crois qu’il y a là un chantier immense qui devrait vous préoccuper en lieu et place de la défense d’un ambassadeur qui outrepasse ce que lui confère le droit international », recommandait si vivement Ousmane Gaoual Diallo.

Manifestement, cette recommandation tombe dans des oreilles de sourds. La tension n’est pas redescendue. Le ministre Cheickh n’en démord pas. Autant que le député de l’UFDG. Selon un analyste, « Les élus du peuple ont tous les droits de dénoncer le dérèglement des institutions qui ne fonctionnent pas à la normale, selon le droit. Vous n’aurez rien à dire, si votre département est bancale, personne

ne va se taire pour ne pas dénoncer. C’est la démocratie, les élus du peuple sont libres de parler des institutions si elles ne sont pas fiables. Nous ne sommes pas dans une dictature, mais la démocratie. Ce que monsieur cheikh Sacko doit comprendre. Si on est au service de son pays, on doit travailler avec l’honnêteté et la dignité, pour défendre les normes du droit. Je vous ai toujours dit qu’en guinée, ce n’est pas le bâton qui est la solution, mais la tête, selon le droit. Vous n’allez jamais retirer l’immunité à un député contre la dénonciation, si elles sont fondées à la réalité. »

Le ministre en est d’ailleurs conscient : « Monsieur le député peut (c’est son droit) jeter l’opprobre sur la Justice guinéenne, mais en attaquant publiquement et par voie de presse une décision de justice, Monsieur le député sort de son rôle d’élu du peuple et enfreint à la séparation des pouvoirs entre le législatif et le judiciaire. » Et la menace est à peine voilée : « Je me réserve la possibilité de saisir le bureau de l’Assemblée Nationale pour demander la levée de son immunité parlementaire s’il continue à attaquer publiquement et par voie de presse les décisions de Justice. » Vraiment… une honte !

Jeanne Fofana, www.kababachir.com

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