Tidiane Soumah : « De septembre à février, la Guinée va vivre les plus gros événements jamais réalisés… »
Alors que l’épidémie Ebola qui a secoué le pays durant ces deux dernières années tend vers la fin, les activités culturelles reprennent peu à peu dans notre pays.
Tidiane Soumah, promoteur culturel et Directeur Général de l’Agence Tidiane World Music nous parle de la relance des activités culturelles et artistiques post-Ebola, de son agence de production, dans un entretien exclusif qu’il a bien voulu accorder à notre rédaction.
Kababachir.com : Après une période morte, en raison du virus Ebola, Tidiane World music reprend ses activités. Comment se porte aujourd’hui le Show-biz guinéen ?
Tidiane Soumah : Je peux dire que l’épidémie Ebola a été une catastrophe pour l’industrie culturelle parce que, nous sommes aussi du secteur privé. Nous sommes des compagnies autonomes, nous avons à faire avec le monde, le public. Ebola a fait déserter le monde, a créé la panique, la peur. Aujourd’hui nous sommes heureux de cette issue, de cette tendance vers la fin de l’épidémie. Sinon ça va être difficile. Aujourd’hui, nous commençons à faire des concerts. Vous avez vu tout récemment Safa Diallo. Aussi on appelé des guinéens pour aller jouer à Dakar. Donc, le terrain reprend un peu. Je pense que bientôt un aura un concert en septembre, un autre en octobre, on en aura en novembre, en décembre, en février. En tout cas le vent reprend et nous espérons que les sponsors et les autorités vont nous accompagner pour ces deux ans de perte.
Quels sont les enseignements que vous tirez du concert de Dakar ?
Les enseignements que je tire du Concert de Dakar, ce que d’abord c’est une bonne idée, puisque les guinéens qui vivent là bas et les sénégalais ont apprécié le projet. Ils ont même demandé à ce qu’on le fasse chaque année. Nous on a vu qu’il y avait une visite d’Etat entre deux Chefs d’Etat. On s’était dit que c’est le bon moment que les citoyens en fasse connaitre leur intention et nous en tant que citoyen on s’est dit que c’est une bonne idée de réconcilier les deux peuples à cause de l’épidémie Ebola. C’était un projet purement culturel, j’ai même exigé à ce que tout le monde soit habillé en blanc. C’était pour éviter la politisation du Concert en question. Donc, j’estime que pour ce teste ça été un coup de maitre parce que sur les dix groupes, huit ont répondu. Et huit ont assuré du côté sénégalais et du côté guinéen, même les gabonais qui sont venus s’ajouter. En plus, on a eu la chance grâce à RTS, qui en a fait son problème, beaucoup de télévisions l’ont retransmis dans le monde.
Pour moi ça été une très belle expérience, le projet je l’ai initié personnellement et j’ai fait financé par une personne. C’est un projet citoyen initié par un guinéen de nom de Tidiane Soumah. Et financé par un guinéen du nom de Kerfala Camara KPC.
L’expérience est très bonne parce que les guinéens ont apprécié, ils ont aimé parce que c’était un projet gratuit qui était offert à eux.
Malgré tout vous semblez être déçu des deux artistes, en l’occurrence Alphadio Dara et Lama Sidibé, que vous avez menacé de porter plainte. De quoi vous les reprochez concrètement?
D’abord je rectifie, pour votre site d’information, Tidiane Soumah n’a jamais porté plainte contre un artiste. Après 30 ans de carrière, je n’ai jamais porté plainte contre un artiste juridiquement parlant. J’ai simplement dit que j’ai été déçu que des amis de 30 ans puissent me jouer un tel coup pour des raisons que je ne peux pas expliquer. Que moi j’ai choisi des artistes, j’ai choisi des amis pas des militants et que leur position de militants ne m’intéresse pas. C’est des artistes que j’ai choisi pour aller chanter la paix. Surtout que tous les grands événements que j’ai fais de ma vie depuis plus de 30 ans, j’ai toujours programmé Lama, que ça soit à Mamou, avec Kassav, Magic système, Alpha Blondy, tous mes grands événements. Donc pour moi c’était une suite logique d’une amitié qui n’avait aucune couleur. J’ai programmé un ami, pour aller chanté en blanc dans une salle à Dakar pour les guinéens et les sénégalais, dans le cadre de l’amitié, dans une visite d’Etat entre le président Alpha Condé et le président Macky Sall. Donc ce n’était pas un candidat qui était là, ou un parti politique, c’est le président de tous les guinéens qui était là, dans une mission officielle. Et je voulais faire un concert citoyen. Donc pour moi ça été une grosse erreur de la part de Lama Sidibé et de Alphadio Dara de ne pas y être. Et pour le cas d’Alphadio Dara, pourquoi j’étais fâché, parce qu’il m’a fait savoir, par l’intermédiaire de son manager qu’il a perdu sa belle-mère. Je vous pose la question Kababachir.com, votre belle mère est mort, vous ne jouez pas le 7, mais vous jouez le 8 en live à Conakry, ça ne tient plus ! Donc pour moi les arguments n’étaient pas fondés. Ils ont remboursés les avances qu’ils avaient perçues, mais moi j’ai perdu 22 millions à cause de l’amende que j’ai payée à travers l’hôtel, les billets d’avion. Et cela je mets Dieu entre eux et moi, parce que c’est eux qui m’ont engagé à faire certaines dépenses. Donc, je les laisse avec leur conscience.
Parlant du cas Safa Diallo dont vous êtes le manager, quelle impression avez-vous sur ce jeune artiste ?
L’impression que j’ai pour lui, ce que je me suis battu pour lui faire connaitre, et Dieu merci le monde a répondu et Safa Diallo a assuré. Il a livré un spectacle digne du nom. Je pense que je n’ai pas eu tort de le mettre devant. Nous nous sommes diffuseurs, si nous on ne donne pas l’espace aux gens qui créent comment ils vont être connus. Safa s’est investi à faire un album à Kingston ‘’Lawol Kinsgton-Conakry’’, il faut l’aider, il faut l’appuyer. Il a investi l’argent dans sa production à l’étranger. Donc nous on l’a offert la possibilité de jouer au palais et je pense que le monde entier verra les images, il a livré un bon concert, malgré toutes les difficultés financières aujourd’hui à Conakry, Safa Diallo a fait un bon spectacle, il a assuré et le monde est venu.
Avec sons style de danse, est-ce que vous pensez que SAFA Diallo a sa place dans le show biz guinéen ?
Il a sa place, c’est le monde de dance-hall, c’est le monde de reggae, c’est le monde de jeunes, c’est la nouvelle génération, le monde évolue. Safa a son monde en Afrique, il a son monde en Guinée.
On a appris récemment que le ministère de la Culture veut organiser une quinzaine artistique. Est-ce que vous êtes associés à cet événement ?
Nous sommes informés, mais on n’est pas associé. Nous avons reçu des lettres d’information, mais pas des lettres d’invitation. Je pense que nous avons lu nos lettres, c’est une simple information qui a été portée à l’attention des producteurs, mais personne n’a été associée à faire quoi que dedans. Donc cette nuance là, je l’ai apprise à la radio, nous avons été informés, j’ai le courrier ici, comme quoi, il y a une quinzaine. En tant que professionnel du terrain, nous n’avons pas été invités à être associé à quoi que ça soit.
Quelle est l’agenda des événements de ‘’ Tidiane World Music’’ au cours de l’année ?
L’agenda il est très chargé, mais je préfère le garder secrètement. Ce qui reste clair, nous avons des plus gros événements jamais fait encore dans l’histoire de ce pays. De septembre jusqu’en février, la Guinée va vivre les plus gros événements jamais réalisés encore. Je pense que ça c’est sur la bonne voie, puisque nous voulons faire des événements de standing international à la sortie d’Ebola, il faut qu’on montre une autre Guinée, attirer le monde entier que la culture a sa place. Et nous en tant que organisateur des grands évènements, nous allons encourager le monde entier à revenir en Guinée à l’occasion des grands événements.
En votre qualité de manager expérimenté, quelles sont les difficultés auxquelles le monde artistique est confronté aujourd’hui ?
Il faut d’abord reconnaitre que l’un est meilleur que soi. Le guinéen veut pas qu’on dise que l’autre est meilleur que lui. Tu vois des gens qui ont l’expérience de 30 ans, ceux qui ont l’expérience de 10 ans veulent se comparer à eux. C’est ça le problème. Il n’ya pas d’hiérarchisation en Guinée. Tout le monde est boss, tout le monde est connaisseur. Des gens qui s’arrêtent au niveau Brevet veulent faire comme des gens qui ont fait l’université. Des gens qui s’arrêtent à l’école primaire veulent se comparer à ceux qui ont fait le Doctorat. Il y a un problème d’amalgame ici. Premièrement, il n’ya pas de statut, deuxièmement, l’industrie culturelle est zéro. On n’est pas professionnel ici. Et troisièmement, il n’ya pas une structuration de la carrière artistique ici. L’artiste va de personne en personne, l’artiste se cherche chaque jour, il tape à toutes les portes. Et quand il vient chez moi il gagne, il va chez un autre il gagne. C’est difficile, il faut que les gens sachent où ils s’en vont. Ailleurs, les gens savent où ils vont, ils sont sereins, ils sont certains. Mais aujourd’hui, des artistes sont avec Tidiane World Music, ils sont avec Paul demain matin. En un mot, il faut professionnaliser le secteur, il faut éliminer les sentiments, il faut que les guinéens respectent les compétences.
Et le cas des infrastructures ?
C’est une catastrophe, il n’y en a pas. De ce côté-là, en 50 ans, la Guinée n’a rien fait. Nous avons un Palais sans budget, sans équipement, sans structure de fonctionnement normal, comme une salle normale. Donc, au niveau des infrastructures, la Guinée n’en a pas.
Nous sommes au terme de notre entretien, quel est votre dernier mot.
Le dernier mot c’est de dire aux médias de nous aider. Ce que nous faisons comme boulot est difficile. Quand on a un problème de source de financement, quand on a un problème dans nos activités et lorsqu’on fait des gros projets ici, on monte des budgets, tu vois des gens qui critiquent les factures, comme si tu es venu pour t’enrichir. Non ! Tidiane World Music ne s’est jamais enrichi aux dos des gens ici en Guinée. Je n’ai fait que des projets correspondants à mes budgets. Et la capacité que je donne à mes événements, l’image que je donne à mes événements collent bien avec mes budgets, parce que je fais des gros événements. Je préfère avoir à faire à des professionnels, des gens qui me comprennent qu’à des profanes. Encore une fois, à Kababachir.com, merci beaucoup. J’ai travaillé avec votre site depuis le Canada quand j’étais déjà installé là-bas, j’ai eu beaucoup de soutien de Kababachir.com, je voudrais attirer votre attention qu’on a besoin de votre soutien pour nous aider à être compris ce que nous faisons est très difficile, très risqué et on a besoin de soutien de l’Etat, le soutien des bailleurs des fonds, et que le sponsoring en Guinée est très faible. Ceux qui sponsorisent ce n’est pas beaucoup, c’est Guicopress, Guinée Games toujours, les compagnies de téléphonie, Palm Camayenne, Super Match,… Sur 600 compagnies, vous n’avez pas plus de 10 compagnies qui donnent, c’est regrettable !
Donc je voudrais attirer le monde entier d’aider la culture, je demande à l’Etat guinéen de faire un paquet dit du management de compagnies qui s’installent en Guinée pour leur dire qu’en aidant la culture, ils auront autre chose ailleurs.
Merci M. Soumah
C’est à moi de vous remercier.
Propos recueillis par Abdoul Wahab Barry, www.kababachir.com
Tel : (224) 628 89 66 85